Quand le sage montre la lune l'imbécile regarde le doigt
L'agitation assez obscène du pouvoir us est si surprenante qu'elle semble échapper à toute logique. Ultra-libéralisme, croisades anti-woke, provocations médiatiques, nominations polémiques, trucages des archives agitent l'empire états-unien. Aussi original que problématique le vice-roi Musk semble être la cheville ouvrière symbolique et réelle d'un exécutif qui choque jusqu'à ses alliés. Cherchant toujours à se réinventer et s'étendre pour ne pas dépérir le capitalisme détruit périodiquement pour mieux construire. Or pour démolir puis rebâtir les normes, règlements, environnement et impôts sont des freins. Or les freins sont utiles quand on va trop vite, mais qu'importe quand on est pressé et qu'on fabrique des voitures !
Pour choisir des ministres il faut, pour que l’État fonctionne, certains filtres, certaines compétences pour arbitrer les conflits, comprendre les concurrents et écarter les escrocs. Or cette prudence plus pragmatique que morale semble avoir sauté avec Trump qui, avec Musk, s'entoure de figures en marge du parti républicain. Depuis ses débuts de manager, Musk n'a cessé de se voir en prophète, un mélange de Moïse et de Colomb. Or, ce type de profil « autiste génial » sûr de lui se prête assez bien aux manipulations...
il a toujours été ouvert... à tous les marchés !
Sud-africain, Musk n'est états-unien que par opportunité. Pour ses affaires il a toujours été ouvert... à tous les marchés ! Ainsi avant son virage réactionnaire récent côtoyait-il sans problèmes tous les dirigeants européens, même les plus retors au trumpisme. Il se disait alors de « centre-droit » au début du mandat de Biden qui voulait verdir (donc électrifier) l'économie us. Pourquoi un tel virage pro-Trump ?
Tesla n'a jamais été dans le viseur de Pékin.
Cette mansuétude implique-t-elle une contrepartie ?
L'empire Musk est centré sur Tesla, c'est l'entreprise qui pèse le plus lourd dans la galaxie de ses sociétés. On le répète rarement mais le plus gros coup de Tesla a été, en 2019, de monter une usine géante à Shanghai. Exploit supplémentaire cette usine appartient à 100 % à Tesla. Généralement les Chinois exigent des partenariats locaux. Pas cette fois. L'homme qui a permit ce deal bénéfique à Musk est le maire de l'époque, Yin Yang. Un personnage puissant qui est aujourd'hui procureur général de Chine, c'est donc un homme très proche du président Xi en personne. Alors que le même président s'en prend périodiquement aux capitalistes chinois ou étrangers jugés trop indépendants, Tesla n'a jamais été dans le viseur de Pékin. Une telle mansuétude implique-t-elle une contrepartie ?
Agité et bruyant Musk a toujours été muet sur la Chine
Agité et bruyant Musk a toujours été muet sur la Chine. Ses intérêts économiques en dépendent car Tesla est très fragile financièrement, ses actions sont notoirement survalorisées, le marché chinois est donc vital. De plus, dans le monde comme en Chine, la société de Musk est directement en concurrence avec BYD, champion chinois de la VE. Favoriser Tesla hier et ne pas la viser aujourd'hui prouve que Musk a une dette vis-à-vis de Xi. Musk la paie-t-il en jouant de sa proximité avec Trump ? Éléments de réponses :
1. Musk avait, dès l'invasion russe de l'Ukraine, activé ses satellites starlink pour aider le pays agressé. Une aide qui correspond à la position de la Chine qui a toujours souhaité un équilibre entre Kiev et Moscou, L'Ukraine était un partenaire de la Chine dans le projet de nouvelles routes de la soie et une terre d'investissements avant 2022. Pour cette raison Pékin aide la Russie à ne pas perdre, pas à gagner.
Est-ce pour ces raisons que Musk est modéré concernant la Chine ? A-t-il poussé Trump à ne pas provoquer la Chine mais plutôt ses alliés ? Pour le moment la tornade Trump épargne délibérément la Chine pourtant rivale assumée.
2. Musk, lui, vise l'UE. Cela va dans le sens de la Chine qui critique les barrières douanières, tarifaires et environnementales dressées récemment par la commission de Bruxelles. Déstabiliser les pays de l'UE c'est donc aussi défendre les intérêts de l'empire chinois. Les silences de Musk ont donc plus de sens que ses aboiements. Multiplier les coups d'éclats permet d'éviter de parler de son agenda caché.
3. Aux USA l'équipe DOGE exclusivement dirigée par Musk (et sans contrôle politique) déstabilise tout l'appareil d’État, CIA et FBI compris, or, ces deux agences avaient pour mission de contre-carrer l'espionnage chinois. A présent la Chine peut sans doute plus facilement agir aux USA voire recruter des agents déçus ou licenciés.
4. Même chose avec la remise en cause de l'USAid, cela laisse de la place à qui dans le monde ? Aux Chinois. Qui est à la tête de cette gigantesque machine à secouer les agences us ? Musk. Un hasard ?
5. Pour finir Musk a déclaré que l'ISS était bientôt en « bout de course ». La station spatiale internationale est un projet qui associe tous les grands pays investis dans l'espace. Tous sauf un. Lequel ? La Chine bien sûr.
Agent conscient ou idiot utile le milliardaire médiatique est, en tout cas, un acteur du jeu chinois dans le monde, à l'heure du siècle sino-américain il faut le savoir.