QUE FAIRE Valeurs et Actions Républicaines

Comprendre 2007

Mars 2006

Comprendre 2007

par Terouga

De par l’architecture de la Ve République, les élections présidentielles sont LE moment central de la vie politique de la France. C’est là que le peuple s’exprime directement sur le devenir du pays à travers le choix d’un Président muni de quasiment tous les pouvoirs. Alors que le Parlement n’a que des pouvoirs limités et que les autres élections sont plutôt locales, les présidentielles sont l’alpha et l’oméga du système politique et des personnages comme François Mitterrand et Jacques Chirac ont réussi contre une majorité de Français à rester puissants simplement parce qu’ils restaient à l’Elysée et refusaient de démissionner.

En 1995 J. Chirac s’impose comme un candidat populaire opposé à la gestion oligarchique de l’État par Édouard Balladur ou les socialistes. On connaît la suite. La lutte contre la  « fracture sociale » est instantanément oubliée et le peuple liquide la droite aux législatives de 97. Cette nouvelle majorité mène scrupuleusement la même politique et subit la même exécution le 21 avril 2002, laissant J. Chirac à l’Elysée avec le tragicomique Raffarin coresponsable de la très nette victoire du NON le 29 mai 2005, etc.

Bref, à toutes les élections, la France sacrifie politiquement les majorités, coupables de surdité, d’arrogance, mais surtout d’incompétence face aux lourds problèmes de la nation.

Du coup, les présidentielles de 2007 présentent plus que jamais un risque majeur pour le système qui ne se sent plus à l’abri d’un nouveau 21 avril qui poursuivra la série de Saint-Barthélémy contre les partis de gouvernement. 2007 risque d’être la suite logique de la déroute de « l’union sacrée » pour le OUI à une Europe ultra-libérale.

Mais la situation est-elle si volcanique ? Les partis dits « d’opposition » recrutent-ils des mécontents ? Les extrêmes (ou prétendus tels) sont-ils aux portes du pouvoir ?

La situation est confuse, compliquée et nous réserve obligatoirement d’énormes surprises…

1. L’UMPS au service des États-Unis

Disons-le tout net, une victoire d’un candidat de l’UMP ou du PS marquerait un succès évident des partisans du modèle américain. Faut-il rappeler que la « gauche » et la « droite » vont régulièrement chercher leurs « idées » outre-Atlantique ? Faut-il oublier que les possibles candidats de ces partis sont souvent diplômés des universités américaines ? Certes, le tonitruant Nicolas Sarkozy a une longueur d’avance dans la logghorée bushiste. Tolérance zéro, discrimination positive, immigration choisie, guerres « préventives »… Les éléments de comparaison ne manquent pas avec les néo-conservateurs états-uniens. Mais si les grandes fortunes ont déjà choisi leur candidat, les autres ne sont pas en reste. Lionel Jospin a suivi servilement Bill Clinton dans sa guerre contre la Yougoslavie. Ségolène Royal copie sans originalité et sans se cacher Tony Blair. Quant aux candidats rabatteurs du premier tour (Verts, ex-communistes, divers « gauche » et « droite »…), ils ne sont là que pour ratisser en vue du second. Ils sont même payés ou soutenus pour ça.

Certes, les Français commencent à réaliser le côté interchangeable de l’UMP et du PS. Le premier tour du 21 avril 2002 a signifié avant tout la déroute des candidats liés, directement ou non, au pouvoir. Par exemple, malgré une agitation de pure circonstance, Robert Hue a ridiculisé totalement le PCF, récoltant le fruit de cinq années de co-gestion libérale du pays.

Bref, à l’arraché, il reste néanmoins possible que face à un candidat repoussoir comme Le Pen ou de Villiers, une tête de l’oligarchie l’emporte, mais la gestion de la France après 2007 sera aussi délicate qu’aujourd’hui. Rappelons que depuis 1995 une majorité toujours croissante de la population ne fait pas confiance aux dirigeants et guère plus à l’Europe. Jospin, Raffarin et aujourd’hui de Villepin n’ont jamais bénéficié d’un sursis supérieur à dix mois. Ensuite, le forcing médiatique, les combines politiciennes et l’absence totale d’alternative ont permis à ces ministres faibles et sous pression, de tenir au prix d’une impopularité phénoménale. Tous finalement suivirent Alain Juppé, totalement discrédité et aujourd’hui mort politiquement. Ses successeurs, malgré des réserves de pure forme n’ont pas changé de cap et ont imposé à la France le consensus européano-libéral.

Un candidat anti-système peut donc très vraisemblablement se hisser au second tour en 2007. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, il cumulera le mécontentement silencieux mais massif des classes populaires et des classes moyennes subissant le libéralisme aveugle et la délinquance d’une jeunesse perdue.

2. La pseudo opposition des « extrêmes »

Mais que peuvent les « extrêmes » ? Certes un candidat populiste/populaire pourra, comme Jean-Marie Le Pen, en 2002, dégager une tête oligarchique, mais après ?

Il est devenu évident que les partis qui s’opposent formellement à nos dirigeants ne sont pas vraiment l’opposition. Les déclarations scandaleuses de Le Pen comme ses propos les plus modérés ne sont rien d’autre qu’un cirque savamment orchestré par des media en mal de scandale. Qu’est-ce que l’extrême-droite aujourd’hui sinon un amalgame instable de vieux fascistes puants (B. Gollnisch et ses propos négationnistes sur les chambres à gaz…) et de jeunes loups excités à l’idée de mettre la main sur les postes (Marine et ses amis…). Et que dire des plus pressés qui ont déjà rallié le navire villieriste ? Non, avec ou sans son âge et ses problèmes de santé, J-M Le Pen appartient au passé et c’est tant mieux ! Ainsi peut-être l’électorat populaire et patriote s’investira-t-il dans un vote plus constructif et moins honteux. Tout paradoxe mis à part, le vieux Le Pen pourrait bien (si on l’autorise à se présenter) refaire son coup de maître de 2002, mais ses ennuis, le côté squelettique de son parti ne lui permettrait nullement de l’emporter définitivement.

Du côté de notre folklorique extrême-gauche, il serait exagéré et faux de tracer le signe « égal » entre extrême-droite et la nébuleuse trotskiste [1], néanmoins, les éléments de comparaison ne sont pas rares.

Que l’on étudie la LCR ou LO, on trouve quelques nouveaux adhérents radicalisés, mais finalement, ces partis franchement minuscules [2] restent dirigés par des vieux vétérans de mai 68, sans programme ni autre désir que survivre à l’ombre du PS et de ses régulières OPA sur la jeunesse de ces organisations.

Bolchévisme et guerre civile pour LO peuvent avoir des côtés distrayants, mais ne sauraient attirer une masse suffisante de militants et de suffrages pour être autre chose qu’un groupe où le courage le dispute au sectarisme. Avec la LCR, la révolution se fait en chantant et en fumant des substances illicites, rien de très original, rien de très subversif non plus.

Ces candidats vont donc très vraisemblablement faire le plein en 2007, mais outre des votes désespérés de Français légitimement mécontents, cela ne signifie strictement rien.

3. Chevènement et Cie

Seule originalité de la campagne de 2002 le discours de Jean-Pierre Chevènement, réellement en rupture avec l’UMPS, mais il en resta au niveau des paroles !

Cerné de socialistes déguisés, poussé au compromis avant même le 21 avril, le courageux ministre rallia sans hésiter le lac amer de ses origines : le PS. Du coup, fort logiquement son parti, le MRC n’a cessé de perdre des adhérents, tous plus décontenancés et hésitants les uns que les autres…

Reste que sa campagne de 2002 a ravivé la mouvance républicaine. Divisée en clubs groupusculaires et parfois rivaux, elle survit, se cherche et reste en première ligne face aux ennemis de la Nation de 1789 (communautaristes, proaméricains, libéraux…) et demeure un foyer de résistance au rouleau compresseur libéral-libertaire.

Notons l’évolution positive de N. Dupont-Aignan, mais ses liens avec l’UMP rendent très suspects son discours. S’il obtient les 500 signatures on pourra légitimement le soupçonner d’être une taupe de Sarkozy.

4. Rupture ?

Plus que jamais le vieux système hérité des années d’après-guerre est au bord de la rupture : volontairement mal géré, sous-financé et discrédité par les partis oligarchiques. Les masses se radicalisent doucement mais sûrement. Difficile encore de dire quand sera atteint le point de non retour, mais force est de constater que depuis 1995 la tendance n’a pas varié : devant le croupissement social et politique, les classes moyennes ont commencé à rejoindre les classes populaires dans le rejet brouillon mais résolu du libéralisme dont nous crevons.

Droite pourrie par le libéralisme anglo-saxon, gauche grotesque et tout aussi pro-américaine, les citoyens sont dans l’expectative, régulièrement tentés par des « extrêmes en papier »…

Gageons que tôt ou tard une nouvelle coalition se compose des militants résolus à rompre sans retenue avec le libéralisme, car, paradoxalement, une majorité de citoyens ne désirent qu’une chose : assumer d’où l’on vient (1789, 1936, 1945) et savoir où on va : indépendance nationale, État social et protecteur. Pour demeurer maîtres chez nous, pour vraiment taxer les richesses et assurer l’ordre public, il nous faut rompre avec l’Union Européenne. Ni plus, ni moins.

 


[1] De cette engeance nous retirons le Parti des Travailleurs qui malgré une origine « léniniste » et des pratiques politiques surprenantes a évolué vers une promotion de la République, de la laïcité ou même de la Franc-maçonnerie.

[2] À eux deux, LO et la LCR ne peuvent aligner plus de 4000 militants !

Date de dernière mise à jour : 02/07/2021

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