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Revivons-nous la Renaissance ?

Renaissance actuellele retour des oligarques

Évoquer la Renaissance c'est penser à Léonard de Vinci ou aux merveilles florentines. C'est une sorte de préhistoire de notre progrès qu'il soit scientifique ou intellectuel. Or, le métier d'historien oblige à dire que la période post médiévale n'a pas été un chemin pavé de roses : si quelque chose de positif est sorti du Moyen-Age il y eu aussi de vraies horreurs, des paniques dignes de nos peurs actuelles mais surtout des maîtres du chaos aux profils très actuels. Les points communs entre la Renaissance et notre époque sont nombreux et essentiellement de trois ordres.

c'est le savoir lui-même qui devient suspect

Premièrement aux XVI° ou au XXI°s le progrès technique a bouleversé les certitudes : la Renaissance comme notre époque sont des périodes de grandes innovations : les techniques, les transports, les savoirs avancent très vite et bouleversent la perception et la compréhension de l'univers. Il suffit de comparer les cartes géographiques à un siècle d'intervalle dans les deux périodes. On considère aujourd'hui que la Renaissance a été le début de nos vérités scientifiques actuelles, mais à l'époque le doute est général et l'angoisse profonde, si Galilée a raison, se peut-il que l’Église -et ses savants- aient tort depuis des siècles ? On imagine la taille de l'univers et plus encore notre infinie solitude. Rien n'est pire que le vide révélé par un savoir démontrable. Du coup c'est le savoir lui-même qui devient suspect. Certains n'ont jamais pardonné à Darwin d'avoir expliqué qui nous étions comme espèce. Il en est de même aujourd'hui où les progrès scientifiques comme l'IA ou demain l'ordinateur quantique traumatisent des sociétés déjà déstabilisées par la question climatique. Être platiste c'est d'abord croire en quelque chose de simple et donc de rassurant, c'est aussi exister dans une économie du buzz.

Le progrès a révolutionné l'art de la guerre à la Renaissance ! Il en est de même aujourd'hui avec les nouveaux armements comme les drones qui relèguent loin dans le passé les armées d'hier. Là aussi la perplexité comme la peur demeurent générales car les nouveaux armements entraînent de nouveaux risques, à la Renaissance ce fut l'artillerie qui fit disparaître la chevalerie.

 

la Tech a tendance à coloniser l'Humanité entière via les écrans


Deuxièmement ces progrès métamorphosent les États : à la fin du Moyen-Age des baronnies modestes deviennent des empires mondialisés comme l'Espagne ou la Russie via des techniques nouvelles : navires et armes à feu ont européanisé le monde entier. Le reste des pays d'Europe suivront cette tendance après la Renaissance. Aujourd'hui la Tech a tendance à coloniser l'Humanité entière via les écrans dont la virtualité transforment le réel. C'est ce qui pousse à la violence certains dont le psychisme n'est pas adapté à cette stimulation permanente. Personne n'échappe plus au numérique et les géants de Wall Street sont tous des entreprises de la Tech. Jadis ce furent les compagnies coloniales qui furent les sociétés les plus riches de l'Histoire. Le monde entier a été reprogrammé par le capitalisme. Aux deux époques les hommes d'affaires deviennent les vrais maîtres de la politique : les Médicis étaient avant tout des banquiers puis de vrais politiciens. Il en est de même aujourd'hui depuis Berlusconi.

la peur semble être le sentiment dominant des deux périodes

Troisièmement la peur semble être le sentiment dominant des deux périodes : l’imprimerie comme internet n'ont pas diffusé que le savoir, ce sont surtout les peurs qui ont été décuplées par la communication. Catholiques et Protestants se sont d'abord détestés via des imprimés. On connaît la suite. Il en est de même actuellement, les réseaux sociaux sont d'autant plus actifs qu'ils véhiculent l'anxiété et la panique : les maîtres des réseaux sociaux donnent le ton des opinions à partager, soutenir ou détester. Un recul démocratique inédit. L'agitation meurtrière autour d'anodines caricatures a été mondialisée via le numérique.

Ces époques sont donc aussi surtout celles des paniques morales, c'est à dire que des événements inédits contredisent le sens commun rassurant. Ces scandales ont pour but de distinguer les sociétés d'elles-mêmes, par exemple le barouf régulier autour de la prétendue transidentité est une mise en abîme de la société qui s'interroge sur l'idée même de normalité. Quand L'homme ordinaire subit des innovations qu'il ne comprend pas c'est toute la société qui stresse. Démagogues ou illuminés utilisent cette anxiété pour véhiculer un message généralement absurde mais qui a le mérite d'exprimer une angoisse réelle. Et les chefs de meutes se servent au passage. L'époque est aux boucs émissaires, le harcèlement ou l'antisémitisme relèvent-ils d'autres mécanismes ? Pour faire corps tout groupe a besoin d'un catalyseur extérieur. Et tant pis si personne ne comprend plus rien à l'ensemble des changements.

L'individu en plein désarroi écoute parfois des théories complotistes dont la première (et seule qualité) est de nier la complexité du monde. Par exemple le masculinisme est une réaction simpliste à la question de la place de la Femme dans l'économie capitaliste post-industrielle. Le racisme est une réaction au métissage des sociétés. L'actualité est donc souvent perçue comme une suite de faits divers choquants très rarement expliqués. Le terrorisme relève bien de cette logique : utiliser une monstruosité médiatisée pour exister dans un monde où seul l'écho médiatique rend réel.

Engels analysa les révoltes paysannes du XVI°s en Allemagne : il y voyait des tentatives proto-communistes de renverser l'ordre féodal injuste. Écrasés sans pitié ces soulèvements ne changèrent rien mais étaient portés par des discours prophétiques puritains aux antipodes de la corruption catholique contemporaine. Actuellement les discours réactionnaires fleurissent également sur fonds d’inégalités et d’injustices quotidiennes, il s'agirait de revenir à un hypothétique passé qui fonctionnait vraiment. Mythes ! L'islamisme est-il autre chose qu'une réponse violente et irrationnelle à des défis inouïs ? Mêmes bavardages impuissants du côté des chrétiens dits évangélistes. Ils ne résolvent rien mais incarnent l'inquiétude devant un monde qui change trop vite. Faut-il rappeler le parcours d'un Savonarole ? Un moine extrémiste populaire pour avoir dénoncé directement la corruption des Borgia ? Mais que proposait-il ? Rien sinon un idéalisme iconoclaste.

La Renaissance fut donc une période de profonds changements mais surtout de violences : la guerre civile semble avoir été le leitmotiv de la période. En est-il autrement aujourd'hui ? Partout on redoute l'ennemi de l'intérieur, le fou, le fanatique, le terroriste, l'Autre... Les oligarques à la mode cachent leurs ambitions demeurées derrière le spectre de la guerre civile. Un classique.

ces peurs sont exagérées et servent les classes dominantes

Il se trouve que très souvent ces peurs sont exagérées et servent les classes dominantes qui possèdent les médias qui imposent ce qu'on doit retenir du réel. Le fait divers fait diversion. Devant des sociétés en mutation les élites serrent les rangs certaines qu'il faut toujours diviser pour régner. Il en est de même aujourd'hui où les exploités, perdants, dominés divers restent dans leurs « niches » sociétales et évitent de poser la question du Système. A la Renaissance l'économie féodale basée sur la rente foncière et la religion était intouchable. Elle fut même exportée telle quelle aux Amériques ! Actuellement les contestataires sont souvent très sectaires et ne veulent surtout pas accepter leur ressemblance avec ceux qu'ils combattent. Le néo-féminisme montre bien cet esprit de revanche aussi stérile que diviseur. Cela n'a rien de nouveau : pour survivre Martin Luther devint le porte-parole de la noblesse germanique, devint antisémite et appela explicitement au massacre des paysans révoltés pour acheter sa place dans les élites de l'époque. Et bien à notre époque aussi on recycle souvent les contestataires qui deviennent d'utiles guignols des puissances d'argent : Michel Onfray n'émarge-t-il pas sur Cnews ?

A la Renaissance il n'était jamais question d'économie comme aujourd'hui personne ne parle trop longtemps d'écologie. Il en va pourtant de notre survie comme espèce. Absolument tout le monde souffre des pollutions, or, les classes dirigeantes, incarnées par le golem « Trumsk », travaillent activement à combattre l'écologie. Le climato-scepticisme est le nouveau socialisme des imbéciles. Défendre l'environnement c'est attaquer les profits et réciproquement. Aux saltimbanques médiatiques de distraire les masses pour éviter toute révolution. En France Bolloré a créé Zemmour pour continuer à régner. Après 1517 devant le défi inédit du protestantisme l’Église voulut tout changer pour que rien ne change : ce fut la contre-Réforme basée entre autres sur une spectacularisation du culte. Un hasard ?

spectacularisation du culte

Dès lors que faire ? Marx disait que les Hommes se posent uniquement des questions auxquelles ils peuvent répondre. La Renaissance déboucha lentement sur l'Humanisme, l'esprit critique, « le droit au bonheur » puis enfin 1789 mais ce furent surtout les gains de productivité qui permirent au gâteau de grossir et aux miettes d'être moins rares à être distribuées.

Les travers du capitalisme ne vont pas disparaître avec Biden. Ici et là se préparent déjà des krachs, crises, révolutions et des événements inédits pourraient advenir avant qu'on se pose sur Mars. En attendant l'urgent est de comprendre ce qui se passe et d'éviter de participer au bordel ambiant.

Date de dernière mise à jour : 11/01/2025

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