la crise des années 30
- Une crise de plus ?
Depuis la fin de la guerre froide le capitalisme mondialisé avance en zigzagues : aux " bulles " succèdent des " corrections ". C'est la même mécanique depuis le krach de 1987 qui était la première étape d'une période inédite de concentration capitaliste. C'est comme si les " accidents " boursiers faisaient parti du système., C'est pour cela qu'aucune leçon n'est jamais tirée : dès que le système s'emballe, les Etats et les banques centrales interviennent massivement (comme au lendemain du 11 septembre 2001), et, passée la bourrasque, les mêmes acteurs continuent d'alimenter le chaudron boursier en privatisant et déréglementant. Entre deux poussées de fièvres les groupes, trusts et autres multinationales ont encore renforcé leurs avoirs en s'associant, se rachetant, se concentrant. Ils inspirent la plupart des politiques publiques...
Ainsi depuis le retour d'un libéralisme implacable dans les années 80 le système s'est réglé sur un pilotage automatique visant uniquement à alimenter la machine : endettement privé aux USA, libre-échange imposé par les directives européennes, privatisations des économies des pays émergents, etc. L'économie réelle est petit à petit devenue une appendice de l'économie virtuelle centrée sur les banques américaines.
"L'originalité de la crise actuelle est qu'elle touche le cœur du système : les banques"
L'originalité de la crise actuelle est qu'elle touche le cœur du système : les banques. Cela explique aussi la panique des décideurs, réalisant avant tout le monde que la machine était sur le point de casser son moteur : sans banque, le système capitaliste imploserait immédiatement et la dépression entraînée serait bien pire en quantité et en qualité que celle des années 1930.
Du coup l'aide a été massive autant pour sauver les " barons voleurs " que pour éviter une faillite comparable à celle du communisme.
La réaction rapide des acteurs politique a évité le pire, mais les sommes astronomiques avancées aux banques vont vite manquer ailleurs et surtout, les responsables de la crise vont pouvoir poursuivre leurs méfaits dans les plus brefs délais.
Pour les vrais gens une récession sévère va s'abattre sur eux.
Une de plus, et il y a tout lieu de penser qu'aucune leçon effective ne sera tirée de cette fin d'année 2008. Comme après chaque crise, le système se rétablit et les mêmes recettes sont exploitées pour (re)faire fortune : les milliers de traders licenciés aujourd'hui seront les nouveaux petits escrocs de demain. Et les paradis fiscaux seront toujours aussi nombreux pour accueillir la comptabilité noire des multinationales. Sans ces zones grises la machine ne pourrait dissimuler ses pertes et ses bénéfices records.
Pire : du chaos financier va émerger des groupes bancaires plus grands et plus puissants encore. Comme le pronostiquait Marx, le capitalisme se concentre et accumule toujours plus de pouvoir.
- A quoi sert l'Europe ?
Certes quelques lois vont être votées pour faire rendre gorge à quelques lampistes, mais l'économie étant très largement privée, les déclarations fracassantes de Sarkozy ont pour but de canaliser la colère populaire et non d'épouvanter les capitalistes qui ont toujours été des partenaires (et même des amis) de tous les Sarkozy du monde...
En Europe les traités européens qui poussaient encore hier à privatiser toute l'économie, empêchent toute politique réellement positive. Si un seul gouvernement voulait vraiment encadrer et réglementer le capitalisme comme ce fut le cas à l'époque de Roosevelt, les Etats les plus libéraux, la Commission et sans doute le " parlement " de Bruxelles s'y opposeraient catégoriquement.
Pourtant, les interventions qui ont évité une extinction totale des liquidités, ont été prises par des gouvernements et nullement pat les institution européennes... Certes des banques ont été partiellement nationalisées, mais là où les Etats sont encore actionnaires, la gestion est aussi dangereuse qu'ailleurs. Renault ou EADS sont des entreprises capitalistes comme les autres. On se suicide chez Renault comme ailleurs et le quarteron de cadres qui ont magouillé sur les délais de livraison du nouvel avion d'EADS valent les voleurs de Enron qui, aujourd'hui, font figure d'amateurs...
Que faire quand un seul trader bien de chez nous peut perdre 600 millions ou même 5 milliards d'euros ? Quelle loi peut empêcher la fraude fiscale ? Les délocalisations ? Le chômage ? Car le contrecoup de cette implosion des banques va entraîner au bas mot 20 millions de chômeurs de plus dans les pays " riches ". La France peut s'attendre à au moins un million de sans emplois supplémentaires dans l'année qui vient. Des gens parfaitement innocents qui perdront bien plus que leurs actions.
Reste à évaluer les conséquences politiques de cette krisis...
Dans les années 80, quand l'économie française commençait à muter et que le chômage de masse se répandait les décideurs ont profité largement du désarroi pour accélérer les " réformes ". L'émission de 1984 " Vive la crise " fut le génial avatar de ce nouveau paradigme politique : la collectivité (Etat, nation, classe ouvrière...) était un frein à la réussite individuel (trader, entrepreneur, Tapie...). La fuite en avant dans l'individualisme a mené au désastre actuel. Et il y a fort à parier pour qu'après la déstabilisation des élites (incarnée par le désarroi de A. Greenspan) le vent souffle toujours dans le même sens... Car quand il n'y a aucune organisation à même de demander des comptes à l'oligarchie, celle-ci reste seule en course et se redresse après avoir flanché.
Nous ne sommes plus dans les années 30 ou 50 quand une partie de la droite et presque toute la gauche voulaient tordre le coup au libéralisme et à ses trusts capables de s'allier au nazisme pour ne pas payer d'impôts.
3. Le degrés zéro de la politique
La société va donc se contracter.
Acculés pas mal de gens vont fuir dans la " débrouille " et autres révoltes individuelles : la prostitution va prospérer, les petites arnaques vont se multiplier et toute une économie de la misère va exploser comme les magasins " discount ", les spécialistes du surendettement, les vendeurs de solutions " alternatives ", les sectes en tout genre ou encore et surtout les vendeurs d'antidépresseurs et autres drogues...
"toute une économie de la misère va exploser"
Sans structure politique à même d'imposer un vrai partage des richesses et un vrai contrôle de l'économie, rien ne changera vraiment : les mêmes catégories sociales seront les éternels victimes du capitalisme. L'endettement sera tantôt un accès très relatif à un certain bien-être, tantôt une fuite en avant dans la dépossession.
Politiquement la situation est sans issue : tous les partis sont derrière Sarkozy et " l'opposition " n'est qu'un chapelet de personnalités toutes plus arrivistes et libérales les unes que les autres. Quelle différence de fond entre Delanoë, Aubry, Bayrou ?
Il y a tout lieu de penser que les discours vont se radicaliser, mais sûrement pas les programmes. Voyons JF Kahn qui rejoint le MoDem après avoir voté OUI à la constitution européenne en 2005...
Qui portera le programme minimum qui sortirait le monde développé de l'ornière ? Une taxe Tobin, une nationalisation du secteur du crédit et surtout un vraie politique monétaire au service de l'activité économique serait un bon début.
Ensuite une politique fiscale qui taxe les vraies richesses (les nouveaux revenus et surtout les produits importés via une TVA sociale) pour redistribuer réellement les plus-values éviterait sans doute le pire.
Mais là, pour porter ces débuts de solutions, plus personne n'est là. Les traités européens font barrage. Même avec Besançenot, nouvel opposant officiel.