ici et là subsistent encore des bâtiments années 50 qui font figure de repoussoirs
A Rennes la gare en impose. C’est commun à toutes les métropoles de province, mais dès qu’on descend l’avenue Janvier on constate le contraste : ici les hôtels de luxe cernés d’autocollants gauchistes, à côté la misère.
Au cœur des poumons capitalistes on réussit plus ou on tombe plus bas… C’est peut-être pour ça que seuls les jeunes et les immigrés semblent travailler. Les autres jouissent de leurs rentes immobilières ou autres… L’immobilier semble être la grande affaire de la ville : ici et là subsistent encore des bâtiments années 50 qui font figure de repoussoirs architecturaux et de passoires thermiques. C’est pour cela que poussent un peu partout des bâtiments très XXI°s avec leurs tons gris, leurs petits balcons et une isolation enfin sérieuse, du moins l’espère-t-on. Bien sûr les classes moyennes sont priées d’aller loger ailleurs et la ville juxtapose ainsi ces îlots de richesses et des trous à pauvres loués fort cher sur AirBnB. D’ailleurs il n’y a pas que cette plateforme qui irrigue la cité : le soir des jeunes hommes basanés alimentent en vélo toute une troupe de bobos qui promènent nonchalamment leur progéniture la journée : on les reconnaît à leur tenue faussement décontractée, à leurs gadgets improbables et à leur mine renfrognée quand ils réalisent le coût de l’arrivée d’un enfant qu’on doit éduquer dans la bienveillance et les circuits courts…
Marcher dans cette ville sans réel but sinon la découvrir permet de s’imprégner de l’ambiance, des traces urbaines : zigzaguer pour éviter les solliciteurs désargentés a aussi le mérite de faire lire davantage, on tombe sur des tags rageurs, des slogans féministes ou l’inévitable propagande autonomiste. Bien sûr je n'ai jamais entendu personne parler breton.
Ces rebelles me font penser aux caniches qui tirent
trop fort sur la laisse de leurs vieilles maîtresses
Le vieillissement, le capitalisme et le plastique ont tellement gagné de terrain que c’est logique que certain.e.s soient crispé.e.s. Ces rebelles invisibles me font penser aux caniches qui tirent une fois de temps en temps trop fort sur la laisse de leurs vieilles maîtresses... Alors tout ce petit monde manifeste, revendique et proteste au milieu d’un désert ou plus exactement au centre d’une forêt de portables…
Mais il est temps de repartir. En voiture on s’éloigne du centre et traverse la première périphérie, une addition de commerces, maisons et immeubles sans unité sinon la polarité du centre. Aux feux, ultime décalage, des autocollants du PRCF, un groupuscule léniniste aussi à sa place à Rennes qu’une bonne sœur chez DSK...