Quelque soit la suite des événements, le néo-conservatisme est donc bel et bien mort dans les sables du Moyen-Orient car même au sein du Parti Républicain, on rejette les analyses caricaturales de ce cénacle d’intellectuels dévoyés.
En Irak, tous les experts sérieux constatent que l’invasion n’a nullement pacifié et démocratisé le pays mais plutôt relancé une guerre civile en germe depuis la fondation du pays par les Britanniques dans les années 30 : à une dictature pilotée par les Sunnites a succédé un gouvernement pro-américain associant maladroitement tous les exclus du pouvoir des années précédentes.
Pour tenir encore un peu, les Américains sont donc obligés de tolérer la main mise des partis chiites les plus proches de l’Iran (à savoir le parti Da’wa et l’Assemblée Suprême de la Révolution Islamique en Irak), un comble quand on sait que Washington menace régulièrement Téhéran.
Ce gouvernement est aussi dirigé par les deux grands partis kurdes jadis adversaires de S. Hussein : le PDK et l’UPK, jadis en concurrence féroce pour rafler les prébendes du Kurdistan autonome. En échange de ce soutien au « gouvernement », les miliciens kurdes ont carte blanche dans les régions qu’ils convoitent, surtout le ville de Kirkouk, zone pétrolière à la limite des espaces de peuplement arabes et kurdes… La minorité turcomane fait les frais de cette volonté de se tailler un « Grand Kurdistan », volonté encouragée régulièrement par Israël qui soutient toujours les ennemis du nationalisme arabe.
Mais, tous les chiites ne sont pas engagés derrière cette étrange alliance américano-chiite. Parmi eux, beaucoup sont plus des patriotes que des partisans de l’Iran. Dès 2003, une tendance nationaliste émerge derrière Moktada al-Sadr, un jeune religieux fils d’un ayatollah mystérieusement assassiné en 1999. Après cette tuerie, il ne se réfugie pas en Iran mais reste en Irak où ses réseaux s’implantent surtout dans le grand quartier chiite de Bagdad. Dès l’invasion américaine, ses hommes occupent le terrain et gèrent le quotidien. Il ne cesse depuis d’exiger le retrait des forces d’occupation et affiche volontiers des positions souverainistes : contre le fédéralisme, les affrontements religieux, la récente loi sur le pétrole, etc. Pris entre les menaces des Américains, les chiites pro-iraniens et les luttes inter-communautaires, M. Al-Sadr tente de maintenir un cap positif et constructif alors même que ses fiefs sont régulièrement frappés par des bombes ou des incursions américaines. En mars 2007, pour les quatre ans de l’invasion, il avait organisé une grande manifestation aux cris de « Ni sunnites, ni chiites, tous irakiens ! ».
A l’ouest du pays, en zone sunnite la résistance islamo-nationaliste est plus vive que jamais.
Depuis l’installation des Américains les opérations militaires n’ont jamais cessé pour tenter de réduire les capacités d’action des milliers de volontaires. Sans succès.