Les Occidentaux ont-ils perdu l'Afghanistan ?
Les Italiens payaient les Taliban pour ne pas se faire attaquer...
1. L'effondrement militaire des soldats occidentaux
La mort de 10 soldats français en Afghanistan en août 2008 a révélé récemment que les soldats italiens précédemment dans la zone avaient payé les insurgés locaux pour ne pas se faire attaquer. Une drôle de façon de faire « la guerre au terrorisme ».! Présumée « sûre » la zone a été investie par les Français qui sont tombés sur plus forts qu'eux.
Mal équipés, peu entraînés, les jeunes soldats tricolores ont été victimes de la politique occidentale en Afghanistan qui cherche à contrer les Taliban sans pour autant ni organiser un pouvoir légitime, ni faire réellement la guerre aux « terroristes ».
Cette triste affaire n'est pas unique. Depuis que les Taliban ont été chassés du pouvoir à la fin de l'année 2001 les troupes sous coordination américaine ont multiplié les erreurs puis les fautes.
Rachid Dostom, chef de guerre jadis pro-soviétique, d'une brutalité sans limite
Première erreur (déjà commise en Irak) s'appuyer sur des « alliés » peu sûrs et surtout notoirement corrompus. Les autorités mises en place après la fuite du mollah Omar étaient composées de seigneurs de guerre qui avaient ruinés le pays avant l'arrivée des Taliban. Leur désir de revanche n'avait d'égal que leur voracité à jouir de « l'aide » internationale. Or cette « aide » n'étaient que des liquidités américaines sensées acheter les fidélités et les milices armées. Rapidement tout l'argent investi a été alimenter des trafics divers et des corrompus afghans ou occidentaux...
Sur le terrain beaucoup de troupes étrangères, peu motivées par cette guerre américaine font tout pour éviter le contact. C'est pourquoi les Français sont peu impliqués dans la guerre, l'enjeu est de ne pas perdre trop d'hommes alors que la France n'a aucun intérêt réel sur place. C'est pourquoi le Italiens payaient les insurgés pour être épargnés. C'est aussi sans doute le cas des soldats Hollandais qui n'ont que très peu de pertes (21 morts) alors qu'ils « occupent » une zone au sud du pays où les Taliban pullulent.
Gulbuddin Hekmatyar, chef de guerre pro taliban,
responsable de la mort de 10 soldats française en août 2008 jadis très proche du Pakistan...
Face aux Occidentaux les Taliban ne sont pas les seuls à agir. Plus de 18 organisations violentes ont été recensés. Les Taliban ne sont plus unis, on a souvent à faire à des chefs tribaux pachtounes (l'ethnie majoritaire) qui ont une politique avant tout locale. C'est ainsi que certains Taliban sont stipendiés par les autorités de Kaboul pour ne pas trop s'agiter. D'autres, sont plus violents mais généralement, peu motivés par le « djihad international » des séides de Ben Laden. Ils occupent le terrain, contrôlent les autorités locales et renforcent leur influence à tel point que les soldats occidentaux doivent négocier avec eux ou les payer pour être simplement tolérés... Le monde à l'envers en somme. C'est une attitude courante dans la région face à des envahisseurs étrangers. Les Britanniques au XIX°s eurent ce problème, de même que les Soviétiques un siècle plus tard. Il en va de même actuellement.
Militairement, seuls les Etats-Uniens et les Britanniques essaient de « faire la guerre », c'est à dire en bombardant les zones rebelles et donc en massacrant au passage des milliers de civils. Malgré des efforts certains les « bavures » sont encore courantes. Ce fut le cas en septembre 2009 dans la province de Kunduz (nord) : l'aviation us a bombardé des camions de carburants volés par des Taliban aux soldats Allemands. Bilan : des dizaines de civils tués... Coincés les camions étaient pillés par des civils misérables. Pourquoi avoir bombardé ?
Cette action a déclenché un tollé en Allemagne. Elle montre que les opinions publiques ne soutiennent plus cette guerre et que les Allemands sont bien peu maîtres de la situation...
Aujourd'hui les autorités de Kaboul ne maîtrisent donc plus grand chose.
L'armée officielle n'est qu'une milice parmi d'autres, peu efficace et surtout dévorée par le trafic de drogue, autre fléau du pays.
2. La société afghane exsangue
Le départ des Taliban en 2001 n'aura été qu'une libération de courte durée. Le retour des seigneurs de la guerre n'a nullement amélioré la situation sur le terrain. Si les filles ont de nouveau le droit d'aller à l'école, bien peu en bénéficient concrètement faute de moyens car l'argent alimente la guerre et la corruption effarante des autorités et des sociétés occidentales sensées « reconstruire » le pays. Reconstruction au point mort tandis que les énergies s'investissent dans la guerre, le trafic de drogues ou l'embauche de mercenaires.
En effet, pour se financer les acteurs de la violence politique vendent de l'opium. Or 80 % de l'opium produit dans le monde vient d'Afghanistan où Taliban et gouvernement rivalisent d'énergie pour contrôler ce psychotrope. En porte-à-faux les Occidentaux laissent faire.
une production d'opium en hausse constante, les Occidentaux laissent faire
Les services publics sensés légitimer le nouveau régime n'existent pas. Des affaires de corruption d'une ampleur inouïe discréditent chaque jour les autorités : ainsi un hôpital géré par un occidental à Kaboul servait en fait de gigantesque palais au responsable du projet qui organisait des fêtes somptueuses et consommait des kilos de caviar (sic) au frais de « l'aide » internationale ! Dans la même ville de Kaboul la misère est effroyable et les attentats quotidiens.
Les dernières élections présidentielles ont été le miroir de cette société afghane complètement ruinée qui ne supporte plus un régime qui a ramené la guerre, la corruption et surtout l'occupation étrangère. Même l'ONU a reconnu des « fraudes gigantesques » en faveur du président sortant, un homme du complexe pétrolier américain...
3. Les Talibans maîtres de Kaboul en 2010 ?
Peut-on imaginer un retour des Talibans à Kaboul ?
Sans la présence de milliers de soldats dont certains combattent les 18 groupes rebelles, le gouvernement de Karzaï serait tombé ou se serait réduit aux zones non pachtounes du pays...
Pourtant un retour du mollah Omar est peu probable car les USA ne pourraient pas admettre une défaite pire que celle des Soviétiques qui tinrent 10 ans et se retirèrent en bon ordre. La situation risque donc de pourrir encore longtemps et des arrangements multiples seront trouvés pour éviter une défaite totale. Si B. Obama a envoyé quelques centaines d'hommes supplémentaires il ne semble pas décidé à augmenter réellement les troupes. Rappelons qu'avec 100 000 hommes les Soviétiques échouèrent, les Etats-Uniens sont moins de 40 000... Chez leurs alliés, seuls les Britanniques font la guerre.
Pragmatiques et opportunistes les chefs Taliban vont peut-être négocier avantageusement leurs positions avec ce qui reste des alliés des Américains. Ils ont déjà de bonnes relations avec l'Iran pour bénéficier de la neutralité de Téhéran (http://www.recherches-sur-le-terrorisme.com/Documentsterrorisme/jundullah-iran-pakistan-taliban.html). Aux seigneurs de la guerre les zones non pachtounes (Rachid Dostom au nord par exemple, les chiites Hazaras au centre...) et aux Taliban le reste du pays. Ce modus vivandi avec l'ISAF, remplacerait la guerre tout court par la guerre des nerfs avec la liquidation des djihadistes comme début de « paix des braves ».
Cela expliquerait leur succès fréquents ainsi que leur encerclement lent de Kaboul car même si les Pachtounes sont absents du nord les Taliban contrôlent presque entièrement la petite province de Kunduz (http://www.recherches-sur-le-terrorisme.com/Documentsterrorisme/afghanistan-taliban-nord-controle.html).
carte des ethnies de la région
Autres textes sur l'Afghanistan :
http://quefaire.e-monsite.com/rubrique,chevalerias-et-l-afghanistan,223821.html
http://quefaire.e-monsite.com/rubrique,sortir-d-afghanistan,210778.html
Forum : http://quefaire.aceboard.fr/