La guerre est toujours un business très juteux
Déjà un an de guerre et déjà une Europe et un monde qui ont changé : après le choc de l’invasion (uniquement prévue par des sources us) l’Europe s’est trouvé obligée de couper les liens économiques et énergétiques avec l’est. Sur le terrain la guerre éclair de Moscou s’est vite muée en recul rapide avec, au passage, des crimes et dégâts inexcusables. Aujourd’hui, du fait de l’ampleur de l’aide occidentale, la Russie est au pied du mur. Reste que, pour l’heure, le gagnant n’est ni l’Ukraine, ravagée, ni l’Europe, bouleversée, ni la Russie mais plutôt... les seuls USA !
On l’a oublié mais les accords de Minsk (2014) devaient régler les problèmes entre Kiev et Moscou. Comme dans pas mal de républiques ex soviétiques il y a de fortes minorités russophones ou russes qui vivent dans des États indépendants, or, si des accords tacites règlent la question, ces « russes » sont parfois vus comme des intrus voir une cinquième colonne de Moscou (c’est le cas dans les pays baltes). En 2008 en Géorgie les Géorgiens pro-russes ont été militairement aidés par la Russie quand la Géorgie a attaqué leurs positions. L’Occident a peu bougé, de même en Tchétchénie où la même Russie a satellisé la zone avec une faction favorable à ses intérêts au prix d’une guerre atroce. Or, en Ukraine la situation post-91 était différente, le territoire était certes dans l’orbite russe depuis des siècles mais aussi proche de l’Union Européenne et de plus en plus liée par des accords politiques, économiques, stratégiques : la majorité non russophone a été à la fois effrayée par les menées de Moscou à l’est de son territoire puis au sud (annexion de la Crimée en 2014) et tentée par un rapprochement avec l’Ouest. Le tout sur fond de crise générale profonde et de baisse de la population. Si certains pays européens ont été prudents (l’Allemagne et la France comptaient sur un deal gazier avec Nord stream 1 et 2 peut-être sabotés par les USA), d’autres piliers de l’OTAN poussèrent à l’intégration aux structures de l’ouest. C’est le cas de la Grande Bretagne qui rejoue son rôle de chien de garde de Washington comme T. Blair en 2003…
la Grande Bretagne rejoue son rôle de chien de garde de Washington
La puissance américaine, mondialisée depuis 45, a besoin d’ennemis pour alimenter son économie civile ou militaire. Peu, à l’exception de P. Conesa, rappelle cette évidence. Rappelons qu’aujourd’hui le budget de la défense us dépasse les 820 milliards de dollars et que l’armée us est présente sur tous les continents. Son invasion de l’Afghanistan en 2001 et de l’Irak en 2003 ont été émaillés de nombreuses violations des droits de l’Homme et du droit international. Dénoncer aujourd’hui les « crimes contre l’Humanité » de la Russie a donc un côté pour le moins baroque...
Les Russes ne sont pas les seuls à commettre des crimes de guerre
Dans cette logique de quête d’ennemis-alibis la Russie a été un candidat idéal car plus faible que la Chine, en déclin, et surtout en pleine dérive nationale-conservatrice. Pour autant que le régime de Poutine soit une authentique autocratie oligarchique il n’est pas faux de rappeler que l’OTAN s’est avancé à l’est après 1991 sans aucune autre justification que d’étendre une alliance militaire en attendant la suite… De même la guerre pour créer le Kosovo en 1999 ou l’élimination de Kadhafi en 2011 ont été vues à Moscou comme des abus de pouvoir manifeste.
Dès lors l’attaque de février 2022 contre l’Ukraine était une réponse au double-jeu us, or, outre le coût humain et moral de cette guerre il est presque certain que la Russie a été piégée comme jadis l’URSS en Afghanistan : les USA ont laissé faire avant d’arriver telle la cavalerie des westerns. Discours moral, binaire, aide massive aux agressés… L’économie de guerre est avant tout un business juteux pour le complexe militaro-industriel us et britannique tandis que les trusts pétroliers font fortune en remplaçant le gaz russe !
Conscient qu’une fuite en avant nucléaire serait suicidaire les deux adversaires ont cadré le conflit à l’Ukraine avec des armes conventionnelles que les contribuables états-uniens et européens vont payer alors que pratiquement tous les services publics sont sous-financés des deux côtés du front… Parler d’offensives prochaines est sûrement une story de plus pour alimenter le marché de la guerre qui va être une nouvelle bulle à Wall Street et ailleurs. Sur place les Russes renforcent leurs positions et les Ukrainiens aussi. Va-t-on vers une "solution" coréenne ?
Il est admissible d’aider l’Ukraine à se défendre mais pas au prix d’une généralisation du conflit ni d’une dérive nationaliste qui se fait jour ici ou là. Poutine ment quand il qualifie Zelensky de nazi mais il existe aussi, à Kiev, des nostalgies nationalistes en lien avec le passé pro-nazi de certains ukrainiens des années 30-40...
Liens : ITW du géostratège J. Dufourcq