Bret a 60 ans !

Breat Easton Ellis s'est-il assagi ?

Cette année, en 2024, l’écrivain Bret Easton Ellis a eu 60 ans ! Relativement assagi, l’auteur phare des années 80-90 a-t-il annoncé l’élection de Trump ? Le déclin de l’Amérique ? Ou au contraire n'a-t-il été qu’un artiste chimique particulièrement exposé ?

Chercher la politique ou la vérité dans son œuvre -uniquement romanesque- c’est engager une quête bien vaine. Le succès planétaire de Ellis repose précisément sur son absence complète d’idéologie et de fond, son succès tient plutôt sur son génie formel, facile à lire il est impossible à imiter.

Le succès planétaire de Ellis repose précisément

sur son absence complète d’idéologie

Fils d’un millionnaire sadique, il fréquente, jeune, le milieu des étudiants en sciences humaines complètement coupés du monde du travail, pourtant socle des USA d’après-guerre. Issus de la classe moyenne ou de la bourgeoisie, ils passent la majorité de leur temps dans des fêtes entre deux histoires d’amour ratées. C’est le tableau ironique d’une Amérique qui s’enfonce alors dans un reaganisme résigné, le tout sur fond de « com ». Car si Ellis a bien senti quelque chose, c’est avant internet, l’importance des médias dans un quotidien où la production disparaît au profit de la consommation. C’est un peu le pendant cynique de Chomsky. Même constat avec son succès le plus controversé : American Psycho (1991), où la supposée critique du capitalisme est le prétexte à un portrait d’un serial killer « comme on les aime ». Quel sens ? Quel style ! Houellebecq n’a été qu’un imitateur d’un Ellis lucide avant tout le monde.

il plante le décor du joyeux chaos libéral

Lui-même déséquilibré et fréquemment drogué, il plante le décor du joyeux chaos libéral qui suit la chute de l’URSS et qui se clôt par le 11 septembre. Une époque confuse et jouissive où le Rouge a disparu et où le Terroriste n’existe pas encore. Et qu’a fait l’Amérique de son triomphe ? Rien, sinon des rejetons complètement esclaves de leurs jouets pour adultes (marques, drogues, gadgets, loisirs…). Ellis, qui est avant tout leur enfant chéri, il n’est ni pour ni contre. Bien au contraire ! Ses livres comme sa vie sont avant tout des miroirs qu’il nous tend, et c’est pour cela qu’il nous fait plus ricaner que rire car on aime avant tout se mépriser. À quand un Ellis chinois ?