Le salaire de la destruction
le nazisme, une réponse du XIX°s aux problèmes du XX°s ?
L'apport principal du livre d'A. Tooze (2012) est de mettre le nazisme dans une perspective économique. Cela complète les analyses idéologiques et politiques du totalitarisme hitlérien.
En effet, le nazisme semble avoir été une réponse du XIX°s aux problèmes du XX°s. Hitler et ses épigones, nés dans une Allemagne récemment unifiée et enclerclée de puissances installées, voulurent garantir un avenir stratégique à leur nation avec les méthodes courantes à l'époque. C'est à dire le colonialisme (comme la France et le Royaume-Uni) et la création d'un "espace vital" qui ressemble à la conquête de l'ouest des Etats-Unis. Les USA furent toujours un modèle pour Hitler : puissance industrielle, ségrégation, conquête au détriment de "sauvages", etc. Toute sa vie Hitler sous-estimera les gains de productivité de l'économie et imaginera donc détourner les richesses agricoles et autres au seul profit de sa "race".
Le bilan de la guerre 14-18 semble confirmer cette analyse : encerclement de l'Allemagne, réduction de la puissance militaire, coût des réparations, faible excédent agricole, etc.
Dès 33 Hitler lance donc le pays
dans une politique de réarmement massif
Dès 33 Hitler lance donc le pays dans une politique de réarmement massif ce qui plombe grandement le budget et plus encore les matières premières. En dehors de la réduction du chômage la société allemande ne gagne rien puisque le niveau de vie reste bas, les libertés réduites et la modernisation symbolique (personne ne peut se payer la "voiture du peuple"). Car en affectant l'acier et le pétrole disponible aux armées (infanterie, aviation, marine...) l'économie allemande flirte sans arrêt avec les pénuries (y compris alimentaires ou de main d'oeuvre), d'où précisément l'attaque de la Pologne puis de l'URSS pour avoir accès à des espaces à coloniser et plus encore à des matières premières (pétrole roumain, blé...). Les guerres nazies furent donc des guerres "coloniales" dans l'optique de celles du XIX°s où peuples et terres colonisés étaient traités comme des "biens". Dans cette optique le massacre des "sous-hommes" pour choquant qu'il soit s'inscrit dans l'optique nazi dans la colonialisme occidental des XIX° et XX°s. Très risquée cette politique du quitte ou double (attaque de la France par exemple) mobilisera de nombreux gradés bien avant l'attentat de juillet 44.
une fuite en avant pour alimenter la machine de guerre
La réduction en esclavage des déportés et le pillage des pays vaincus comme la France sont une fuite en avant pour alimenter la machine de guerre qui sera toujours insuffisante face aux armées soviétiques à l'est et à l'armement états-unien à l'ouest. Finalement les dangers de l'encerclement s'aggravent du fait même de la paranoïa nazie... Avant 39 aucun pays d'Europe ne veut affronter Hitler. L'innovation des dernières années de la guerre (avion à réaction, V1, V2...) ne pourront trouver de suites militaires... fautes de matières premières !
Ainsi en voulant échapper au cauchemar stratégique (encerclement) Hitler précipitera son pays dans un cauchemar intégral, ruinant définitivement le rêve nazi d'un empire germano-raciste européen et permettant l'essor de la vraie puissance allemande : la puissance industrielle pacifique d'aujourd'hui.
Date de dernière mise à jour : 03/03/2017