Charlie Bauer avec G. Lanvin dans le cadre du film "Mesrine" (2009)
Au début de ce siècle on pouvait avoir une certaine sympathie pour Charlie Bauer.
Militant « révolutionnaire » passé par toutes les prisons, écrivain, charismatique… On peut multiplier les titres qui en font quelqu’un d’apprécié et d’appréciable du moins dans une certaine gauche…
C’est avec cet a priori plutôt positif et suite à sa mort brutale en août 2011 (une crise cardiaque à l’âge de 68 ans) que j’ai entamé la lecture de son autobiographie, Fractures d’une vie, publiée avec succès en 1990 (rééditée depuis chez Agone).
Mais heureusement ou malheureusement j’ai changé d’opinion à la lecture complète de ce livre de plus de 400 pages. En effet, si on peut partager les révoltes de Bauer contre la guerre d’Algérie, les brutalités de certains policiers ou le capitalisme en général on ne peut nullement admettre ses méthodes et moins encore ses choix. Ainsi sera-t-il un détenu indocile multipliant les tentatives d’évasion jusqu’à sa première libération conditionnelle. L’occasion d’un nouveau départ ? Il se marie, a une fille… et milite pour la libéralisation du cannabis en suivant des trafiquants ! Soit. Ensuite, c’est une série de repérages pour tenter de faire évader des prisonniers aux quatre coins de l’Europe (sic)… Puis la plongée dans la clandestinité avec un certain J. Mesrine. Ce dernier n’est pas plus révolutionnaire que l’auteur de ces lignes est évêque, mais tant pis ! Les deux hommes préparent des attentats contre les QHS (quartier de haute sécurité démantelés après 1981).
Tout ça pour ça ?
A cette période Bauer participe aussi avec le même Mesrine à la torture d’un journaliste d’extrême-droite, Jacques Tillier. Il niera les faits dans sa biographie de 1990 (il a été acquitté plus tôt pour ces faits) avant de les reconnaître plus tard. A-t-il des regrets ? On aimerait le savoir. Quand Mesrine sera liquidé Bauer sera arrêté et repartira en prison. Un total de vingt-cinq années avant d’être définitivement libéré en 1988. Or, l’ambiance a changé en France, culturellement les « bandits » et les « gauchistes » post 68 sont à la mode dans certains milieux. Bauer profitera de l’ascenseur et finira conseiller technique sur le film « Mesrine » avec V. Cassel. Tout ça pour ça ?
Reste que la postface de la réédition des éditions Agone montre qu’après sa libération, C. Bauer a enfin trouvé un équilibre. Toujours militant contre l’enfermement il participera à plusieurs projets artistiques et cette fois-ci sans jamais rechuté. Ouf !