Hypnotique et ambigu...
Difficile de faire la critique de M. Houellebecq. Ecrivain connu et provocateur, foncer dans ses pièges ou le glorifier donne toujours l'impression de se faire manipuler. C'est d'autant plus le cas après la lecture de son roman Soumission (2015) où il utilise à son profit "l'obsession islamique" actuelle pour mieux raconter, une fois de plus, sa vie à travers un énième double.
un universitaire traine sa solitude
et sa dépression à la Sorbonne
Car Soumission c'est avant l'histoire d'un nouvel avatar de l'auteur. C'est le cas dans tous ses romans. Dans La carte et le territoire il apparaissait même ad nominem ! Là, même trame : un universitaire -spécialiste de Huysmans- traine sa solitude et sa dépression à la Sorbonne. C'est tout juste s'il a, de temps à autre, des rapports amoureux et/ou sexuels globalement décevants bien sûr (scènes X poussées comme dans tous ses romans)...
La première moitié du roman nous emmène, à travers ce triste sire, dans l'élection présidentielle de 2022 où s'opposent au second tour un candidat musulman rallié par plusieurs partis politiques et Marine Le Pen. L'auteur fait monter la pression et une vraie tension est palpable dans le livre, même à coups d'invressemblances. Il recycle même le discours islamophobe le plus cru, celui des "identitaires". Surpris, choqué ou séduit par ce discours on "marche"...
le reste du livre fait un virage à 180°
Or, le reste du livre fait un virage à 180°. Le narrateur et le reste de la France -comme Huysmans en son temps- découvrent les charmes de la soumission... à un nouveau dogme rassurant ! Est-on soulagé quand le vide de la modernité est comblé par un monothéisme ? Est-ce si simple ? Est-ce une illusion personnelle ou une solution collective ?
Tout le charme et l'ambiguité de M. Houellebecq sont là. Raconte-t-il la vie comme Zola en son temps ou raconte-t-il sa vie ?
on peut être affligé par la
place de la Femme dans son oeuvre
De même on peut être affligé par la place de la Femme dans son oeuvre en général et dans Soumission en particulier : renvoyées chez elles pour faire baisser le chômage, heureuses d'évoluer toute leur vie dans un univers enfantin, ravies de la polygamie elles ne sortent pas grandies du roman. Dommage. Là aussi la caricature est facile. Trop.
L'auteur a-t-il encore quelque chose à dire ? De quoi traitera-t-il dans son prochain livre ? En tout cas on espérerait qu'il revienne à la force révolutionnaire de Extension du domaine de la lutte, brulôt social de 1995... Mais, avec Soumission, l'auteur a trouvé une autre fuite en avant.